L'acouphène se définit comme la perception d'un bruit par un individu, en dehors de toute source sonore extérieure. C'est un symptôme très fréquent, qui pose de nombreux problèmes, aux patients qui en souffrent, mais aussi aux médecins et scientifiques qui s'en occupent.
Il existe plusieurs types d'acouphènes, selon le timbre, grave ou aigu, pur ou complexe, selon le caractère uni ou bilatéral, continu ou discontinu. Les acouphènes peuvent être objectifs, c'est à dire qu'ils sont audibles par l'entourage ou par l'intermédiaire d'un stéthoscope, ou le plus souvent subjectifs, c'est à dire que seul l'individu les perçoit.
La gêne ressentie est variable d'une personne à l'autre, certaines s'en accommodent, d'autres présentent de véritables souffrances. Mais la présence d'acouphènes doit toujours commencer par la recherche d'une cause. En effet, ils peuvent être le témoin d'une pathologie de l'oreille moyenne, de l'oreille interne ou du nerf auditif. Il appartient à votre médecin traitant de vous adresser au spécialiste ORL pour faire un bilan clinique et paraclinique de votre acouphène.
Quels sont les examens qui seront pratiqués par votre ORL ?
Après un interrogatoire sur l'ancienneté du trouble, et la recherche de causes possibles, notamment l'exposition au bruit (soudain ou chronique), ainsi que vos antécédents médicaux et chirurgicaux, l'ORL examinera en premier lieu de manière attentive vos tympans, puis l'ensemble de la « sphère » ORL.
L'audiométrie est l'examen de base pour vérifier votre audition, ainsi que la tympanométrie avec étude des réflexes stapédiens dont nous avons déjà parlé dans le chapitre sur la surdité de perception.
En fonction des résultats de ces premiers examens, votre spécialiste pourra demander la réalisation d'autres explorations :
- Des potentiels évoqués auditifs
- des potentiels évoqués otolitiques,
- voire une IRM centrée sur la voie auditive en cas d'anomalie de ces examens.
Au terme de ce bilan indispensable, le diagnostic est le plus souvent évoqué.
Les causes sont nombreuses nous ne ferons que citer les plus importantes
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la cause la plus fréquente est probablement le traumatisme sonore,
qui détruit partiellement les cellules sensorielles situées dans les plages allant de 4000 à 8000 htz (au début). C'est justement sur ces fréquences que les acouphènes apparaissent. Le mécanisme est complexe, mais en simplifiant on peut dire que le son perçu par le cerveau correspond justement aux cellules sensorielles atteintes. Le schéma ci après est une façon simple de décrire le mécanisme des acouphènes
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l'autre cause très fréquente est la presbyacousie, c'est à dire la dégénérescence de l'audition liée à l'âge.
la majorité des personnes âgées présentent probablement des acouphènes, seulement une partie en a conscience, et parmi ceux-là un petit nombre en souffre.
La cause la plus « médiatisée » est le neurinome de l'acoustique ou schwannome du nerf vestibulaire
C'est une affection rare, 500 nouveaux cas par an sont dépistés en France, mais la fréquence est probablement sous-estimée du fait de l'évolution lente de ces tumeurs. Il s'agit d'une tumeur bénigne se développant au niveau du nerf vestibulaire, et notamment de sa branche inférieure. Ceci explique l'intérêt des potentiels évoqués otolitiques dont nous avons parlé. La progression de cette tumeur va d'abord comprimer le nerf auditif, donnant une surdité d'aggravation progressive, puis la tumeur peut continuer à se développer vers le tronc cérébral qu'elle va comprimer. Le diagnostic est soupçonné sur un faisceau d'arguments cliniques et paracliniques, et c'est l'IRM qui permettra d'affirmer ce diagnostic en montrant une tumeur située dans le conduit auditif interne débordant plus ou moins de son orifice interne. Son traitement est chirurgical lorsque l'évolution est rapide, certaines équipes utilisent une sorte de radiothérapie évitant un geste neurochirurgical. La chirurgie est le fruit de la coopération entre les ORL et les neurochirurgiens.
Les autres causes sont dominées par les pathologies qui entraînent une dégénérescence plus rapide de l'audition :
Diabète, hypercholestérolémie, tabagisme, hypertension artérielle, certains traitements médicamenteux, (chimiothérapies, antibiotiques, aspirine etc..)
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Il faut citer une cause qui peut aggraver les acouphènes
La contracture des muscles mandibulaires : un trouble de l'articulation temporo-mandibulaire (appareil manducateur) peut provoquer des tensions musculaires autour de l'articulation, qui se trouve près de l'oreille, et aggraver de petits acouphènes pré-existants, voire d'en faire apparaître. Le traitement de ce dysfonctionnement permet parfois de faire disparaître les acouphènes ou plutôt d'en atténuer la gêne. Mais des études doivent être menées pour prouver cette hypothèse.
qui peuvent être le témoin d'une malformation vasculaire. C'est votre spécialiste ORL qui déterminera la nécessité d'un bilan complémentaire notamment la réalisation d'une Angio IRM qui permet de détecter ces anomalies.
Quels sont les traitements des acouphènes ?
Lorsque l'on fait une recherche sur internet, on constate que plus de 116000 références sont citées. Même s'il existe des redondances (plusieurs références pour un seul site), cela souligne l'intérêt de cette pathologie, mais aussi le désarroi des patients atteints, et probablement des médecins amenés à s'en occuper. Hormis les causes relativement rares pour lesquelles le traitement de la cause a permis une disparition des acouphènes, la plupart du temps les acouphènes sont au premier plan.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que le bruit n'est pas généré par une stimulation extérieure, mais que c'est au niveau du cerveau que tout se passe. Un patient qui a été opéré d'un neurinome de l'acoustique et qui a eu le nerf sectionné continue à avoir des acouphènes alors que l'oreille interne a été détruite. D'autre part, s'agissant d'un phénomène subjectif, il est très difficile de mesurer l'intensité réelle d'un acouphène, et c'est sur le vécu de l'individu que l'on se base pour en estimer la gêne. Il existe d'ailleurs des questionnaires qui permettent d'évaluer la « gravité » de cet acouphène.
Quelques pistes sont intéressantes à connaître pour favoriser l'habituation, c'est à dire pour que le cerveau ne tienne pas compte de ces bruits :
- Dans certaines contrées indiennes, les individus qui sont atteints d'acouphènes sont heureux ! Pour eux, cet acouphène est généré par la parole de Dieu, c'est lui qui leur parle à l'oreille. Il n'est bien entendu pas question pour un thérapeute de demander à son patient de croire à cette manifestation divine, mais de faire comprendre que selon la perception positive ou négative d'un symptôme, celui-ci peut être perçu différemment.
- Les personnes qui vivent près d'une voie ferrée n'entendent plus les trains au bout d'un moment, sauf s'ils y font attention. C'est souligner le pouvoir du cerveau d'occulter les bruits environnants qui ne sont pas « utiles ». Il s'agit d'un bruit discontinu, mais le même phénomène se produit pour ceux qui habitent près d'une rivière, où le bruit est continu.
- La plupart du temps, lorsque l'on est occupé, ou concentré sur une tâche, les bruits environnants ne sont plus perçus
- Les acouphènes sont le plus souvent entendus, ou semblent se renforcer, dans le silence, c'est à dire le soir, ou dans la nuit. L'existence d'un fond sonore, même réduit peut les masquer.
- A contrario nous n'entendons pas notre respiration, ni notre coeur battre (le plus souvent), preuve que le cerveau ayant considéré que c'était normal, a occulté ces bruits.
A partir de ces quelques observations on peut déjà déduire quels sont les petits moyens permettant d'occulter la présence de ces acouphènes :
- Un facteur essentiel dans les acouphènes est la place que l'on a dans son environnement social. Si l'on est isolé ou « renfermé » sur soi-même il est évident que les acouphènes seront vécus péniblement. Le stress, la fatigue, la dépression aggravent la perception des acouphènes. Toute activité permettant de lutter contre ces états psychologiques défavorables améliorera la souffrance vécue par le patient.
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L'augmentation des acouphènes est probablement liée à l'attention que l'on y porte. Le but étant d'essayer de les considérer comme faisant partie de son environnement, et d'éviter de les « écouter » pour savoir s'ils sont toujours présents.
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Il faut renoncer au silence : il n'existe pas. Au contraire, écouter la radio le soir, à faible intensité permet souvent de masquer l'acouphène tout en reportant son attention ailleurs
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Il faut éviter l'exposition aux sons trop forts, avoir une « hygiène de vie » correcte (alcool, tabac, alimentation, activité physique).
Les autres traitements
- On peut aider par quelques traitements dits à visées « vasculaires » (trimétazidine par exemple), mais leur efficacité n'est pas prouvée. Les médicaments qui agissent sur le système nerveux sont plus efficaces, le problème reste la durée de la prescription, et les effets secondaires, notamment la somnolence.Les appareillages auditifs qui agissent comme « masqueurs » d'acouphènes. La génération d'un bruit par ces appareils, permet de masquer l'acouphène.
- Les stimulations magnétiques transcrâniennes peuvent donner des résultats pour certaines équipes
- La prise en charge par une équipe pluridisciplinaire dans un centre spécialisé est parfois nécessaire, elle repose sur l'aspect psycho-affectif des acouphènes
- des médicaments sont actuellement à l'étude, preuve que la recherche est toujours active dans ce domaine.
Au terme de ce survol sur les acouphènes, il faut retenir qu'il n'y a pas de fatalité, qu'il existe des moyens de soulager, à défaut de supprimer, et qu'il s'agit le plus souvent d'un symptôme qui n'est que le témoin d'une anomalie assez mineure de la voie auditive. C'est notre cerveau qui joue le rôle d'un amplificateur, et c'est aussi lui qui permettra de baisser le son pour le rendre supportable.
Pour une information supplémentaire.
Plusieurs liens sur cette page renvoient sur le site de france acouphène qui vous permettra d'approfondir le sujet
Page mise à jour le 22/02/2022